Alors voilà, j’avais l’intention de lancer une nouvelle rubrique du jeudi, en alternance avec les colères, mais je ne savais pas trop quand commencer. L’actualité fait que je préfère m’intéresser à mes volatiles qu’à l’état du monde, qui me terrifie. Je n’ai pas les mots pour en parler, juste des nausées. Alors, je regarde les poules et les canards par la fenêtre de la cuisine. Déjà en temps normal, j’aime bien les observer: ça détend de voir un volatile, pas forcément très gracieux mais mignon, qui trottine en bringuebalant sur la pelouse. C’est apaisant et il y en a encore plus besoin en ce moment.

Pour cette première, je vais faire les présentations. Côté canard mignon (c’est leur race, ce sont des mini canards), on a la cheffe, en sa qualité d’aînée de quelques semaines, à savoir Bérénice. Elle aime beaucoup les humains et vient discuter abondamment avec eux ou leur picorer les pieds amicalement, mais elle n’a pas que ça à faire. Bérénice est débordée, elle mène sa troupe à la baguette et n’hésite pas à rappeler les autres à l’ordre quand ils ne se mettent pas en rang correctement. Elle est suivie de Joséphine, qui est la plus amicale et aventurière du groupe. Joséphine adore les humains, elle leur saute carrément sur les genoux en frétillant de joie. Elle explore tout avec un enthousiasme qui fait plaisir à voir. Et puis il y a Prosper, d’une placidité remarquable mais qui se venge d’être le suiveur des deux autres en développant un plumage magnifique.

Côté poules de soie, il y a Millicent, qui fait figure d’ancêtre et de vieux sage. Physiquement, Millicent resemble à une explosion de plumes, mi gothique pour la coiffure, mi coussin, mi Chewbacca. Millicent est d’un calme olympique en toute circonstance: un brin d’herbe qui bouge trop et affole toute la basse-cour? Millicent ne bronche pas. Une nouvellle variété de graines dans la mangeoire qui existent tout le monde? Millicent ne réagit pas. Un chat qui passe un peu près? Millicent ne le remarque même pas. Soit c’est la poule la plus zen au monde, soit elle n’y voit rien avec ses plumes dans les yeux. On a ensuite les Dupont et Dupond des gallinacés, Philomène et Imogene, qu’on ne reconnaît qu’à la patte gauche de la première, qui esr atrophiée. Ce handicap n’empêche pas Philomène d’être là plus exploratrice des poules. Toutes les trois aiment bien les caresses et adorent se faire porter, comme des oiseaux de proie et paradent comme ça, perchées sur les mains des humains, dans tout le jardin.

Entre les deux, il y a Nestor, un temps surnommé Temporaire, avant qu’on sache si c’était une poule ou un coq de soie, c’est à dire tout petit et fluffy. Vu les cocoricos enroués qu’il essaie péniblement de sortir, il n’y a plus doute. Sauf que lui est persuadé d’être un canard. Il passe son temps avec eux et il se met en rang derrière Bérénice…mais il est sympathique. Joséphine a d’ailleurs décider de l’aider. En voyant qu’il n’arrive pas encore à sortir des cocoricos convaincants malgré tous ses efforts, elle se met à côté de lui et cancane comme un klaxon sous acide avec enthousiasme. C’est à dire que dans notre basse-cour, c’est une minuscule cane qui remplace le chant du coq pendant lui fait « crrrr crrr » à côté d’un air inspiré.

Voilà, rien que d’en parler, ça va de suite mieux….dans deux semaines, je commencerai vraiment cette rubrique, mais en attendant, je termine comme j’ai l’intention de le faire à chaque fois: par une pensée de Millicent, cette grande philosophe de basse-cour.