Mummy’s boy reloaded


Je suis toujours en mode maman ravie débordée d’avoir enfin les 5 à la maison. J’en profite avant que L’Ado reparte sur Londres, même si on sait qu’il rentrera souvent. Avec les restrictions alimentaires qui s’annoncent pour après le brexit, j’ai confiance, L’Ado et son estomac reviendront même très souvent. Mais bon, je me suis dit que c’était le moment d’actualiser un vieux billet qui date de quand nos relations mère-fils ont commencé à évoluer. On en est toujours plus ou moins là, malgré les quelques mois d’erasmus et d’éloignement familial.

L’Ado n’a plus l’âge où c’est la honte d’être vu en public avec sa mère et il demande même spontanément à m’accompagner dans mes déplacements divers depuis qu’il est rentré. On discute, on refait le monde, c’est très bien (d’ailleurs, si un dirigeant quelconque me lit, on a de grandes idées. Si). Je me dis qu’il grandit et que c’est agréable qu’on arrive à bien s’entendre…mais comme l’a fait remarqué Marichéri, on s’est toujours bien entendu, même quand L’Ado me traitait de fasciste et que je râlais après ses sautes d’humeur adolescentes et vice versa. 


L’Ado est un grand qui se prend pour un adulte responsable, il vote, il a eu un job d’été et il date du siècle dernier, c’est à dire qu’il est presque un vieillard d’après ses sœurs. Il va vivre en colloc’ étudiante avec ses potes à Londres, et ça fait deux ans que ça dure. Il veut être journaliste et a déjà écrit plusieurs articles pour un magazine de foot en Angleterre, il a même été publié dans le Guardian. Je suis très fière de lui. Mais à la moindre petite anicroche,  il se précipite…mamaaaan….mon train est en retard. Ben attend le suivant. Ah, ouais, ok…, mamaaaaaan je mets un t-shirt crade ou une chemise pour mon interview ? Mamaaaaan, tu peux relire mon essai? mamaaaaaan, le prof conseille de lire Goethe, t’en penses quoi? Alors qu’il a quand même vécu en erasmus loin, très loin pendant un an, il était toujours pendu au téléphone à la moindre anicroche. Avec rappel toutes les trente secondes pour qu’on suive en direct: c’est bon, ils me font un contrat de location. Ok, ben accepte alors…aaah, ouais d’accord, attends je remonte leur dire. Mamaaan, c’est bon, j’ai le contrat…ben signe le! Aaah ouais, attends, je vais chercher un stylo….(ça a duré comme ça plus d’une heure, je n’étais pas du tout crispée, à 1500 km de L’Ado). C’est le seul qui demande mon avis sur tout comme ça. Pour trouver cet avis fasciste une fois sur deux certes, mais bon…on discute beaucoup foot aussi. Et il tient compte de mon opinion avant d’envoyer ses articles. Pareil pour ses disserts à la fac qu’il me fait relire (y compris pendant son semestre en Italie. Alors que je ne parle pas italien), on se lance dans de grandes explications de textes enflammées sur Montaigne par Skype. On partage nos idées sur Almodovar, c’est fun. Mais aussi sur Dante. Pas le footballeur, l’ecrivain…quoique, sur le footballeur aussi. Et on est tous les deux très contents de discuter comme ça. Mais on se dispute aussi comme des chiffonniers, surtout que niveau mauvais foi, je suis 100% pire que lui. Il râle et ça m’amuse. 

Je n’avais pas conscience de cette relation spéciale avec L’Ado jusqu’à ce que Marichéri me le fasse remarquer. Depuis, je m’interroge. Est-ce dû à l’heureux caractère et la patience de L’Ado? Est-ce parce qu’on partage le même sens de l’humour débile (même si c’est Marichéri le grand maître en la matière)? Est-ce que L’Ado me rapporte tout parce qu’il en a pris  l’habitude petit, quand on n’était que tous les deux toute la journée avant l’arrivée de GeekAdo? Est-ce que je l’ai trop materné? Pourtant, il évolue. Il vit sa vie loin. Mais il téléphone toujours religieusement pour raconter tout, y compris ses repas (il n’y a que sur sa vie sentimentale qu’il est d’une discrétion qu’il croit hermétique). Attention, on s’entend bien mais on n’est pas pote, et il le sait. Certes, on rigole bien (et on s’engueule aussi), il me trouve trop excitée, je le trouve trop mou, mais même au milieu des rires ou des cris, c’est chacun à sa place. Il sait qu’il y a des limites et il y tient. Un peu de respect je suis ta mère pas ta pote, et oui je sais encore mieux que toi pour l’instant. Même quand il me traite de fasciste, il est au fond rassuré d’avoir une autorité à laquelle se raccrocher, tout presque adulte qu’il prétend être. D’où les coups de téléphone 50 fois par jour et les demandes de conseils incessants…j’en suis très touchée, émue même.

Bon cela dit, quand j’ai écrit ce billet au départ, L’Ado venait de me montrer les brochures publicitaires qu’il avait ramené de la foire aux logements de l’université (pour avoir mon avis). Un petit sachet carré et plastifié est tombé d’un dépliant. Aaaah, c’était pareil quand j’étais étudiante, des tas de boîtes n’arrêtaient pas de nous en distribuer gratuitement, ça servait de support publicitaire pour tout et n’importe quoi…L’Ado a  ramassé le petit carré plastifié et il a commencé à se marrer. C’était un sachet de thé. Oups! Non, mais ça va aller maman, t’es cool…ça doit être plus fun d’être étudiant en France qu’en Angleterre, quoi. Dix minutes après, on pleurait encore de rire tous les deux en délirant sur le sachet de thé et la vie étudiante des deux côtés de la Manche. L’Ado a raison, ça va.

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3 commentaires pour Mummy’s boy reloaded

  1. Frédérique dit :

    ahh ; superbe cette complicité ; et le coup du petit sachet qui tombe ….bravo d’avoir su continuer cette relation spéciale (au secours Maman ; j’fais quoi ??? )

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  2. Agdel dit :

    Je ris aussi parce que dans le pack d’accueil à la cité U de mon étudiante, le petit sachet carré n’était effectivement pas du thé…
    J’ai un peu les mêmes relations avec mon jeune adulte (je ne peux plus dire ado à 24 ans) : j’ai beaucoup apprécié, quand il étudiant pas loin de mon boulot, de partager quelques pauses-déjeuner avec lui en discutant de sujets d’adultes. Mais lui aussi, en cas de problème, appelle sa maman pour lui demander de l’aide (c’est sûr que je peux faire quelque chose quand son TGV est en retard et qu’il a loupé sa correspondance !), comme s’il pensait encore que j’étais toute-puissante. Pas plus tard que la semaine dernière, c’est moi qui ait géré son problème de piratage de carte bancaire (OK, il était au boulot…)

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  3. Claire dit :

    Trop chouette!

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